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Lis tes ratures !!

Parce que jouer sur les mots quand on parle de bouquins, c'est méta.

Delphine de Vigan - Les Heures souterraines

Publié le 29 Novembre 2019 par Lyra Sullyvan in Delphine de Vigan, Romans français, 2009, Contemporain, Le Livre de Poche, Autrice

Chaque jour, Mathilde prend la ligne 9, puis la ligne 1, puis le RER D jusqu'au Vert-de-Maisons. Chaque jour, elle effectue les mêmes gestes, emprunte les mêmes couloirs de correspondance, monte dans les mêmes trains. Chaque jour, elle pointe, à la même heure, dans une entreprise où on ne l'attend plus. Car depuis quelques mois, sans que rien n'ait été dit, sans raison objective, Mathilde n'a plus rien à faire. Alors, elle laisse couler les heures. Ces heures dont elle ne parle pas, qu'elle cache à ses amis, à sa famille, ces heures dont elle a honte. Thibault travaille pour les Urgences Médicales de Paris. Chaque jour, il monte dans sa voiture, se rend aux adresses que le standard lui indique. Dans cette ville qui ne lui épargne rien, il est coincé dans un embouteillage, attend derrière un camion, cherche une place. Ici ou là, chaque jour, des gens l'attendent qui parfois ne verront que lui. Thibault connaît mieux que quiconque les petites maladies et les grands désastres, la vitesse de la ville et l'immense solitude qu'elle abrite. Mathilde et Thibault ne se connaissent pas. Ils ne sont que deux silhouettes parmi des millions. Deux silhouettes qui pourraient se rencontrer, se percuter, ou seulement se croiser. Un jour de mai. Autour d'eux, la ville se presse, se tend, jamais ne s'arrête. Autour d'eux s'agite un monde privé de douceur.

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Mon ami Léo m'a parlé plus d'une fois des romans de Delphine de Vigan, il fallait bien que je me lance !

J'ai donc entamé avec ce court roman doux-amer qui ne dépeint que trop bien la société actuelle. On se laisse entraîner dans le quotidien difficile de ces deux personnages avec qui la vie n'est pas tendre, qui sont bien seuls, et pour qui la lumière peine à se frayer un chemin.

C'est criant de réalisme, douloureux et écrit avec soin. J'ai été touchée et émue par ces personnages et par leur parcours de vie. J'ai eu le coeur brisé par le fait que je sais que c'est une réalité pour beaucoup de gens et que même s'il y a pire, il y a quand même beaucoup plus vivable. Ca vous en met un coup sévère à l'empathie. Mais c'est important, et nécessaire, et bien raconté. 

Ces émotions ressenties, même si loin d'être évidentes à gérer, me donne envie de découvrir ce que l'auteur fait d'autre, parce que saisir avec cette justesse ces moments de vie dans la société actuelle, les émotions des gens, la réalité des relations et les peindre ainsi, ça demande un certain talent, et c'est malgré tout plaisant à lire.

Citations : 

"Mais les gens désespérés ne se rencontrent pas. Ou peut-être au cinéma. Dans la vraie vie, ils se croisent, s’effleurent, se percutent. Et souvent se repoussent, comme les pôles identiques de deux aimants. "

"Les gens qui aiment au-delà de ce qu'on peut leur donner finissent toujours par peser. "

"La compassion n’avait lieu qu’au moment où l’on se reconnaissait dans l’autre, au moment où l’on prenait conscience que tout ce qui concernait l’autre pouvait nous arriver, exactement, avec la même violence, la même brutalité.
Dans cette conscience de ne pas être à l’abri, de pouvoir descendre aussi bas – et seulement là – la compassion pouvait survenir. La compassion n’était rien d’autre qu’une peur pour soi-même. "

2009, 248p.
Editeurs : Le Livre de Poche

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